La biathlète des Saisies Justine Braisaz sera vendredi au Grand-Bornand. En quête de régularité, les résultats de la Savoyarde sont à l'image de sa personnalité : énigmatiques.
La Savoyarde Justine Braisaz retrouvera le Grand-Bornand ce vendredi 20 décembre pour les épreuves de biathlon. C'est dans cette station qu'elle a réalisé son premier coup d'éclat, deux années en arrière, en remportant sa première victoire en Coupe du monde. Mais depuis son sacre, la Française de 23 ans a connu un parcours en dents de scie.
Après sa victoire lors de la mass start en décembre 2017, elle était promise à un avenir radieux mais les échéances qui ont suivi ont vite douché les espoirs de la biathlète des Saisies, en quête de régularité. Cette saison, la courbe de ses résultats est toujours aussi énigmatique, à l'image du personnage.
En quatre courses, elle est passée par toutes les émotions, débutant l'hiver par une piteuse 83e place sur le sprint d'Ostersund suivie d'un succès sur l'Individuel avant d'enchaîner avec un passage par Hochfilzen dans la même veine (25e du sprint, 4e de la poursuite).
Justine Braisaz : « Avec le Grand Bo, c’est un peu une histoire d’amour. Je suis impatiente de courir ce week-end mais en restant très détachée de ce qu’il s’est passé il y a 2 ans, j’en ai besoin. » #ALGB19 #mongrandbo #biathlonfamily #biathlonworld pic.twitter.com/wXzwn5sben
— BiathlonAnnecyLeGdBo (@BiathlonALGB) December 17, 2019
Un parcours qui colle à son caractère insaisissable mais qui l'empêche pour le moment, malgré son immense potentiel, d'assumer un quelconque leadership chez les Bleues. Adepte des montagnes russes sur la piste et inclassable en dehors, Braisaz, dont le discours souvent abscons et décousu, est plus que jamais difficile à cerner.
"Un de mes proches me dit souvent que j'ai besoin de me déconstruire pour me reconstruire plus forte, a-t-elle lancé. Je pense que c'est une réalité. Je vis l'instant présent. Quand je fais une mauvaise course, je suis déçue mais derrière j'arrive à relativiser et à me détacher de l'attente des gens. Je n'ai pas besoin de prendre une claque mais je sais rebondir après une claque."
A l'aise sur des skis, déroutante à la carabine
Comme elle le reconnaît elle-même, c'est "sous pression" qu'elle perd ses moyens et "réussit moins bien (s)es courses". Un sacré handicap tout de même pour évoluer au plus haut niveau mais c'est sans doute là où se situe la clé pour percer le mystère Braisaz. Et le plus déroutant avec la Française, c'est qu'elle donne l'impression de fort bien s'accommoder de cette instabilité, devenue une marque de fabrique assumée.
"Depuis le début de saison, il y a eu des hauts et des bas mais je m'éclate, a-t-elle déclaré. C'est sûr que globalement, on peut se dire : « la nana, elle fait les pyramides de Gizeh » mais si on prend les courses une par une, chaque course a une explication, assure-t-elle. Je sais qu'il y a des attentes mais les miennes sont centrées sur moi et la notion de plaisir. Je veux construire mes courses comme j'ai décidé de les construire."
Franck Badiou, longtemps entraîneur de tir des hommes avant de s'occuper des dames depuis cet hiver, est assez cash quand il s'agit de décrire le cas Braisaz, à l'aise sur les skis mais si déroutante derrière la carabine.
Performances en yo-yo
"Elle n'a pas une force de concentration phénoménale, a-t-il indiqué. Dans le tir, elle n'a pas la capacité d'être fine sur la technique à mettre en place le jour venu avec cette notion d'adaptation. Tout le monde n'est pas Martin (Fourcade, ndlr). Mais on arrive à bien communiquer, il y a un peu un mythe autour d'elle. Elle commence à avoir une vision plus réaliste de ce qu'elle est et de ce qu'elle peut faire."
Les propos de Franck Badiou font un peu écho à ceux, cinglants, du patron du biathlon français Stéphane Bouthiaux avant le début des Mondiaux en mars à Ostersund où elle finira par décrocher le bronze de l'Individuel : "On a toujours l'impression qu'elle est absente. Quand on parle avec elle, elle écoute mais je ne suis pas sûre qu'elle entende."
Pour Frédéric Jean, l'entraîneur des Bleues, Braisaz a "envie d'aller au plus simple et peut-être que le yo-yo dans ses performances se fait quand ça devient compliqué avec les à-côtés de la course, comme les médias, un domaine qu'elle n'apprécie pas trop, parce qu'elle n'est pas à l'aise. Elle se sent alors en danger et ne sait pas comment s'y prendre."
Cela tombe bien, Braisaz se dit "libérée", "détendue" et affirme disposer désormais de "bases plus solides sur lesquelles s'appuyer" avant d'attaquer le sprint vendredi au Grand-Bornand. Reste à savoir pour quel résultat.